Conclusion

Quel que soit le contexte de l’évaluation, il importe dès le départ d’être au clair avec les objectifs d’apprentissage poursuivis. C’est le cadre de référence pour l’élaboration de la séquence, des choix de contenus et des démarches d’évaluation (instrumentées ou non). Cela renvoie au concept d’alignement pédagogique (Biggs, 1996) qui traduit la recherche de cohérence entre les visées / objectifs d’apprentissage, les activités d’apprentissage et les démarches d’évaluation de ces apprentissages. Dans ce contexte précis, la constitution préalable d’une grille critériée et son usage peut être un outil pertinent pour renforcer cette cohérence et développer une compréhension commune des attentes. Pour l’élève, comprendre comment elle ou il sera évalué l’aidera à déterminer la manière (stratégies mobilisées, par exemple) dont elle ou il s’engagera dans les tâches ou activités proposées, et ce, quelle que soit la démarche d’évaluation (Gérard, 2002). Tout comme le sens conféré aux apprentissages, la transparence du processus d’évaluation et la capacité pour l’évaluatrice ou l’évaluateur à pouvoir justifier sa démarche ou ses démarches renforcent la relation de confiance instaurée avec la personne en situation d’évaluation.

Dans le contexte actuel de l’évaluation des compétences et le choix progressif d’entrer dans une évaluation multifactorielle, il faut souligner l’intérêt de penser l’évaluation comme étant intégrée ou continue. En effet, si l’évaluation des apprentissages, incarnée par la fonction certificative, a pour perspective de produire des bilans, souvent requis par un cadre institutionnel, ceux-ci doivent être mis en perspective avec ce qui relève de l’évaluation- soutien d’apprentissage (fonction de régulation) ou encore évaluation en tant qu’apprentissage (fonction d’autorégulation). Ces différentes fonctions de l’évaluation ont pour perspective de situer l’élève dans ses apprentissages et la manière dont elle ou il procède pour les réaliser. Elles traduisent un état de ceux-ci utile tant aux enseignant·e·s qu’aux élèves, conduisant à des ajustements dans sa manière d’enseigner ou d’apprendre. On observe de fait souvent une concordance entre les bilans ou constats produits par les évaluations de l’apprentissage et ceux issus de l’évaluation-soutien d’apprentissage, une même évaluation pouvant répondre à une perspective différente en fonction du moment où on y fait référence et du but qui lui est assigné.

Tout au long de cet ouvrage, nous avons montré que l’évaluation, quelle que soit sa fonction ou sa démarche, est complexe et composite. Ce n’est pas un acte anodin ; d’où la nécessité de (se) former à l’évaluation pour viser la construction et le développement de savoirs, savoir-faire et postures appropriés. Nous avons également valorisé tant des démarches que des pratiques évaluatives bienveillantes et transparentes qui respectent la dignité de chaque apprenant·e, favorisant l’équité et contribuant à la construction d’une école plus juste. Si nous voulons insuffler à la fois un mouvement de professionnalisation et une perspective constructive de l’agir évaluatif, il nous faut :

    • Adopter une approche humaniste : l’évaluation ne doit pas être perçue comme une simple mesure de performance, mais plutôt comme un moyen de comprendre les forces et les besoins des élèves pour les aider à progresser sur le chemin de l’apprentissage. Il s’agit de reconnaître que chaque élève est unique, avec ses propres talents, ses expériences et ses défis. L’évaluation est donc au service du développement de l’apprentissage, de la croissance et de l’épanouissement du sujet.

    • Garantir un accès à des évaluations justes et équitables : l’égalité doit être au coeur des démarches et pratiques d’évaluation. Trop souvent, les systèmes scolaires, sans en avoir nécessairement conscience, ont tendance à favoriser certains groupes d’élèves au détriment d’autres. Il s’agit de lutter contre ces biais, en prenant en compte les différences culturelles, linguistiques, individuelles, sociales et économiques, tout en adaptant les méthodes d’évaluation en conséquence.

    • Impliquer les sujets : l’évaluation doit être démocratique, c’est-à-dire qu’elle doit impliquer les élèves dans le processus d’évaluation. Cela signifie faire participer activement les apprenant·e·s à la définition des critères, au bilan d’apprentissage et à la prise de décision. La transparence et la participation de toutes et tous sont essentielles pour garantir une évaluation juste et équilibrée.

    • Mettre en oeuvre des principes éthiques fondamentaux : l’évaluation ne doit pas porter atteinte à la dignité des apprenant·e·s, ni compromettre leur bien-être. Il s’agit donc d’interroger en continu la valeur de ce que l’on fait, d’agir avec intégrité et de veiller à ce que les résultats de l’évaluation soient utilisés pour soutenir la progression de l’apprentissage. En ce sens, les feedbacks jouent un rôle crucial dans l’univers éthique en faveur d’une évaluation constructive.

Nous sommes en mesure de conclure que l’évaluation abordée sous l’angle d’une perspective humaniste, égalitaire, démocratique et éthique devient un puissant levier pour favoriser tant le développement des sujets que la construction d’une école plus juste et responsable.